Bénin : les réformes d’avancement en grade dans l’armée préoccupent le Chef de l’Etat

Au Bénin, le Chef de l’Etat Patrice Talon est préoccupé par les réformes d’avancement en grades dans l’armée.

Selon Africa Intelligence, « le président béninois, Patrice Talon, doit, dans les prochains jours, se pencher sur l’avenir de la réforme des grades de carrière au sein de l’armée béninoise, lancée en 2022. Depuis un peu moins de trois mois, le sujet fait l’objet d’une réflexion au sein du premier cercle entourant le chef de l’État béninois.

Parmi les scénarios à l’étude figure celui de l’annulation de cette réforme. Selon plusieurs hauts cadres de l’armée, celle-ci serait jugée particulièrement impopulaire auprès des officiers subalternes. Particulièrement sensible, elle a même fait l’objet d’une note confidentielle remise à Patrice Talon, fin décembre 2024 ».

La missive évoquait un « malaise profond » parmi les cadres de l’armée concernés, en particulier les capitaines. En première ligne dans la lutte contre les groupes armés, les hommes occupant ce grade commandent pour beaucoup d’entre eux des unités de combat sur le terrain.

Structurer la hiérarchie

Selon la note, ils vivraient assez mal la réforme des grades de 2022, qui impose un délai de sept ans avant le passage au rang d’officier supérieur. Bien qu’officiellement pensée pour structurer la hiérarchie et éviter les promotions expresses, elle s’avère à leurs yeux une entrave à leurs aspirations et à leurs promotions.

Parmi les gradés qui planchent depuis le début de l’année 2025 sur le sujet figure le général de division Fructueux Gbaguidi, chef d’état-major général des armées et ancien enfant de troupe du lycée militaire de Saint-Louis au Sénégal. Il avait entrepris dès sa prise de fonction, en 2022, une réorganisation de la présence militaire dans le nord du pays. L’influent Bertin Bada, directeur du cabinet militaire et homme clé du dispositif sécuritaire de Patrice Talon, fait aussi partie du projet. Enfin, le ministre délégué à la défense nationale, Fortuné Nouwatin et le colonel Faizou Gomina, commandant de la Garde nationale et ancien chef de l’opération Mirador, sont également associés aux réflexions en cours. Le président les a discrètement réunis le 27 décembre 2024, dans la foulée de la réception de la note.

Le président béninois souhaite néanmoins prendre son temps. Fin 2023, il avait déjà longuement hésité avant d’avaliser la proposition du chef d’état-major de créer un groupement de forces spéciales. Jusqu’alors, l’État ne disposait pas d’une telle unité à proprement parler, et c’est la Garde nationale, créée en 2020, qui jouait ce rôle de corps d’élite, tout particulièrement dans le nord du pays.

Comptant un millier d’hommes, elle est essentiellement composée de commandos parachutistes et de fusiliers marins. Mais, au-delà du risque de concurrence aiguë au sein de l’appareil sécuritaire qu’elle pourrait susciter, la création d’une force de ce type demeure également sensible au vu du rôle actif que les unités de forces spéciales ont pu jouer ces dernières années dans les coups d’État ayant frappé plusieurs pays d’Afrique francophone.

Contexte délicat

Le contexte béninois est, lui aussi, particulièrement délicat alors que l’ancien tout-puissant bras droit de Patrice Talon, Olivier Boko, a été emprisonné en 2024 sur fond d’accusations de complot. La présidence béninoise s’est longtemps intéressée à son entregent supposé au sein des cadres de l’armée.

Le moral des troupes engagées dans le Nord est une source d’inquiétude supplémentaire pour Cotonou, alors qu’une attaque le 8 janvier a coûté la vie à 30 soldats dans la zone de dite du « Point Triple », aux confins des frontières avec le Niger et le Burkina Faso. Quelques jours plus tôt, le 31 décembre, le président béninois avait célébré le Nouvel An avec les militaires de la caserne de Dessa, à Allada, dans le sud du pays. Durant son discours, il avait tenté de mettre en avant son bilan militaire, tout particulièrement en matière d’acquisition de nouveaux équipements.

Dans le même temps, Patrice Talon se montre favorable à une intensification de la coopération avec Paris. Une quinzaine de militaires français sont actuellement présents de manière permanente dans le pays et leur nombre devrait s’établir à 50 d’ici à la fin de l’année 2025. Appuyant discrètement l’armée béninoise, ces soldats, dont l’empreinte a vocation à être peu visible, sont logés dans des villas mises à leur disposition ou à l’ambassade de France.

 

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